Réparer les vivants

Ce n’est pas un hasard. Plutôt un accompagnement. Ma petite maman meurt. Sa disparition soudaine est un vertige, laisse place au chagrin, coupe le souffle, creuse les douleurs, verse les larmes… je croise Marianne, elle me tend ce livre de Maylis de Kerangal, Réparer les vivants. Un titre inspiré par Tchekov, « enterrer les morts, réparer les vivants ».
Je lis. Vite. Je dévore ce texte qui m’emporte à la première seconde, dès les premiers mots, comme un torrent de montagne ou une vague d’océan immense. L’écriture est vive, forte, houleuse. Le récit de la mort cérébrale de Simon Limbres et de la mécanique extraordinaire, urgente, qui se met en place autour de cette mort pour que de petits morceaux de lui battent encore en d’autres corps, d’autres vies. Tout est juste. À couper le souffle. La geste chirurgicale, la dignité des soignants, le basculement douloureux des parents, passant du refus à l’acceptation du don, la première rencontre amoureuse de Simon et Juliette, le cœur en chamade, le cœur fragile de Claire, elle qui va recueillir, abriter, la pompe de Simon, la description clinique, au scalpel, des prélèvements successifs, jusqu’à la préparation de la dépouille, restitutio in integrum. J’en sors abasourdi, époustouflé. Un grand livre.

Réparer les vivants, Maylis de Kerangal, Editions Verticales 2014